La chanson de protestation de Rubén Blades : mode d’expression d’une pensée diasporique transcontinentale latino-américaine

Gérald Désert

References

Electronic reference

Gérald Désert, « La chanson de protestation de Rubén Blades : mode d’expression d’une pensée diasporique transcontinentale latino-américaine », Archipélies [Online], 6 | 2018, Online since 11 December 2018, connection on 28 March 2024. URL : https://www.archipelies.org/408

Cette étude souhaite montrer l’évolution du mot « diaspora », en prenant pour postulat les réflexions de Denise Helly sur les diasporas classiques et en les comparant aux diasporas héritées du système colonial en Amérique latine. Il est question de voir comment dans les Sud, en l’occurrence en l’Amérique latine, dans les sociétés postcoloniales reconstituées, le terme « diaspora » peut acquérir un autre sens en lien avec les notions de statut social et de marginalité. A travers la chanson de protestation de Rubén Blades, il s’agit de comprendre comment s’exprime la pensée diasporique transcontinentale latino-américaine et comment les populations marginalisées, notamment indigènes, récupèrent peu à peu la place qui leur a été ravie dans le système social.

This study intends to show the evolution of the word Diaspora, the initial postulate being Denise Helly’s reflections on the classic Diasporae by comparing them with Diasporae inherited from the colonial system in Latin America. It is about studying how in the South, in this particular case Latin America, in reconstituted postcolonial societies, the term « Diaspora » can acquire another sense in connection with the notions of social status and marginality. With Rubén Blades’s protest songs, it is a question of understanding how the reconstituted diasporique transcontinental Latin American thought expresses itself and how the marginalized populations, in particular the natives, regain little by little their rightful place in the social system.

Introduction

Le mot « diaspora » naît depuis la Haute Antiquité selon Denise Helly. Il renvoie initialement à la « dispersion des Juifs à travers le monde à la suite des persécutions de l’Antiquité »1. De manière générale, il désigne « l’état de dispersion d’un peuple, d’une communauté »2. Au gré de l’évolution historique et sociologique mondiale et plus précisément européenne, ce terme va acquérir des connotations positives (expansions commerciales, conquête, dispersion…) ou négatives (punition divine, déracinement forcé, souffrance, intolérance, expulsion…) et ne va pas cesser d’évoluer jusqu’à nos jours en fonction des espaces dans lesquels les groupes humains se situent (EE.UU, Caraïbe, Amérique latine…)3. Stéphane Dufoix signale qu’aujourd’hui, le terme concerne plus d’une cinquantaine de populations dans le monde4. Les nombreuses études sur la question posent le problème fondamental de la définition. Il demeure intéressant de se positionner par rapport à l’espace géographique latino-américain qui permet une réflexion ô combien ouverte sur la notion de diaspora en Amérique Latine. Il est alors difficile de fixer un seuil quantitatif et temporel qui permettrait de qualifier une communauté de diaspora. Comment établir alors une limite pertinente ? Ces interrogations pour lors, font droit à l’idée de complexité voire d’ambiguïté de cette notion de diaspora. C’est le cas quand on prend en compte la chanson de protestation de Rubén Blades, dans la lignée de la « Salsa Consciente », vecteur idéal de la pensée diasporique en Amérique latine, donnant une valeur idéale macrocosmique au microcosme de la marge paupérisée, exploitée, incarnant une pensée dans laquelle se retrouve représentée une diaspora transcontinentale, voire planétaire. Ne doit-on pas voir dans le processus de paupérisation qui affecte l’Amérique Latine, une marginalisation de l’humain, de l’autochtone pour reprendre la pensée de José Martí, un état de dispersion, d’errance qui désarticule paradoxalement une certaine pensée de système stato-national ?

Rubén Blades naît dans le Casco Viejo de San Felipe, à Panama, le 16 juillet 1948. Il fait partie d’une famille nombreuse et modeste. Son grand-père, Rubén Natanael Blades, est originaire de l’île de Sainte-Lucie (c’était un Noir) et sa grand-mère paternelle, Emma, était une artiste-peintre, écrivaine, rosicrucienne. Son père, Rubén Blades (un Noir métis), a travaillé dans la police secrète de Panama. Sa défunte mère (une Blanche) Anoland Díaz, originaire de Cuba, fut une pianiste de talent. Rubén Blades a suivi une carrière juridique pour devenir avocat et faire plaisir à sa mère ; diplômé de l’Université Simón Bolívar de Panama, il n’a jamais exercé. Il s’est toujours passionné pour la musique en dépit des recommandations de sa mère et après avoir intégré la Fania All Star dans les années 70 à New York5, il devient progressivement un chanteur engagé, un défenseur de la cause latino-américaine pour ses chansons empreintes d’humour noir, d’amertume et à la fois de foi et d’espérance. Il a poursuivi un 3e cycle universitaire en droit à Harvard School ; ce qui le singularise davantage encore en tant qu’artiste. Il convient de signaler que Rubén Blades, sujet de notre étude, par le truchement de sa pratique artistique de la chanson de protestation, exprime une pensée diasporique transcontinentale latino-américaine.

Alors, quel statut acquiert la diaspora latino-américaine à travers la chanson de Blades ? Y-a-t-il continuité ou rupture avec le concept de diaspora classique ?

1. Diaspora : un rapport du centre à la périphérie marqué depuis la colonisation

Le xixe siècle est symbolique car il amorce en Europe l’esprit stato-national. En effet, comme nous le signale Michel Foucher, « l’Europe se présente comme un continent ancien, qui vit se former les premiers Etats-Nations »6 ; à partir de là, se développent pleinement les notions de nationalités, de territorialités, de minorités nationales, de discriminations. Il s’établit véritablement une norme qui fixe les termes ou codes culturels, linguistiques et cultuels. Les populations en errance sont des diasporas à l’intérieur d’une nation qui posent problème selon Denise Helly, puisqu’elles peuvent être considérées comme anationales ou anti-nationales, étant donné qu’elles ne font pas allégeance à la nation. D’ailleurs, ces communautés de la diaspora seront considérées comme « les ennemis de l’intérieur », et de ce fait, discriminées, méprisées… Ce phénomène se produit partout, dès lors qu’un groupe n’obéit plus aux règles fixées par la politique de la nation.

Poursuivant l’analyse de Denise Helly, le mot « diaspora », dans les années 1960, diffère de flux migratoires, lesquels sont causés par le développement du capitalisme et évoque la dispersion et le lien au pays d’origine : « le terme diaspora par la traversée des frontières, la victimisation, la volonté de durer et la solidarité qu’il évoque, en vient à incarner le destin de non-Européens transplantés ou émigrés en Occident »7. En effet, en fonction de l’origine, le terme prend ou ne prend pas de sens. Il désignerait une population qui ne serait pas de souche (racine), mais une population en errance (rhizome). Ce terme sera donc en constante mutation, notamment dans les années 60-70, par exemple, en parlant de métissage, de miscégénation ; il sera une représentation, un discours, une revendication. La colonisation qui resurgit sous d’autres formes, a été un rapport de force dans la Caraïbe et en Amérique latine, et a imposé des groupes communautaires lésés par rapport à d’autres.

Selon Aníbal Quijano8, « l’Amérique, la modernité et le capitalisme sont nés le même jour ». Le patron de domination entre colonisateur et colonisé fut organisé et établi sur la base de l’idée de la race9. Sur le continent latino-américain, l’Amérindien, dans la plupart de ces pays, malgré les prises d’indépendance au xixe, est une victime dominée par le système culturel colonial, et de ce fait discriminé. Dans cette construction nationale de l’époque, l’Amérindien vivant dans des régions rurales souffre d’un véritable problème agraire et social, ne disposant pas des clefs lui permettant d’accéder au savoir du monde global, à l’épistémologie du système monde, soit à la modernité ; il est donc en marge du monde dit « universel » et incarne à son corps défendant, dans l’inconscient du citadin, l’errance, la misère quotidienne, l’ignorance, le primitif, le barbare. Dès les premières lueurs de la colonisation et jusqu’à nos jours, il apparaît avec le système de l’encomienda10 comme un être servile affecté comme par nature à l’exploitation agricole ou minière du pays (voir le cas du Chiapas, état disposant du sous-sol le plus riche du Mexique, exploitant le plus d’indigènes11).

Cependant, la terre pour l’Amérindien n’est pas source uniquement de richesse, elle est le fondement de son organisation sociale, de l’origine de ses us et coutumes. L’on comprend alors les nombreux mouvements réactionnaires qui ont eu lieu en Équateur en 1990, les « Mapuches » et les « Pehuenches » au Chili, les « Zapatistes » en 1994 au Mexique (Chiapas), comme expression de protestation contre l’injustice, la passivité des gouvernements, la dollarisation de l’économie. Observons que ce n’est que tardivement, c’est-à-dire dans les années 1990, que les ethnies indigènes dans certains pays de l’Amérique latine sont reconnues et disposent d’un pouvoir juridique et d’un statut particulier. On pourrait s’interroger sur les motifs et enjeux de cette intégration tardive.

Les Espagnols quant à eux, ont, durant la colonisation, créé un système de division raciale du travail basé sur la typologie (castes) et articulé autour de la dynamique du capital, pour mieux dominer l’Amérindien et créer des conflits endogènes. Nous connaissons à ce sujet le bestiaire utilisé pour caractériser le métissage en Amérique et dans nos régions insulaires (Mulâtre, Coyote/Cholo, Chabin, Câpre…12), situant de même les populations noires en Amérique latine (voir le cas des Colombiens noirs) qui ont été pendant longtemps considérées comme étant invisibles, sans statut13.

2. Globalisation et diaspora

Généralement, comme nous venons de le voir, la culture dite « indigène », culture mère en Amérique, est une culture méprisée, dénigrée par les populations métisses tournées vers la modernité occidentale, par les Créoles, voire les populations blanches d’Amérique. Notons de même que les populations amérindiennes ne s’inscrivent pas dans ces dynamiques globales (colonisation et exploitation), matérielles, de calcul et de conception du progrès et sont donc, de toute évidence, incapables, et cela depuis le choc des cultures, de proposer cet enjeu de séduction que soumet la modernité, elles ne sont donc pas attractives face au projet de la globalisation. Elles sont représentées dans l’esprit relatif des couches moyennes et hautes continentales, comme étant en arriération culturelle. Bien qu’elle s’affiche comme étant résolue, la question de l’identité, par cette occultation, reste une préoccupation, surtout si on la met en relation avec les minorités. La colonialité du Pouvoir (race/travail/genre) devenant la colonialité du Faire (imaginaire/double conscience/habitus) selon l’analyse de Luís Martínez-Andrade, la représentation identitaire est faussée par le prisme déformant du processus colonial. C’est que l’Amérique latine est un continent à fortes particularités régionales, composé d’un tissu complexe de cultures diverses qui font que l’identité nationale est ici quelque chose d’ambigu.

Les cultures européennes et étatsuniennes sont parvenues à s’ériger en « modèles » de développement, par le positivisme comtien en Europe, par la doctrine Monroe aux États-Unis (légitimation d’une nouvelle nation face au Vieux Monde), mais aussi par le jeu de la conversion chrétienne, catholique ou protestante, en imposant une logique du pouvoir et de hiérarchie qui bridèrent toute évolution de la condition du dominé ; et en même temps, elles réussirent à séduire les populations moyennes et riches. De ce point de vue, le symbole de réussite dans le système mis en place par le « Centre » et construit par les Blancs créoles en Amérique, est forcément l’identité monolithique dominante du Blanc. L’ordre délibérant, les élites politiques, les oligarques, sont pour la plupart des descendants d’Espagnols. Ils ont su préserver leurs prérogatives et les faire fructifier en verrouillant toute altérité. Selon cette analyse sociohistorique, le « Blanc » serait alors le seul porteur des valeurs de la « civilisation ».

Il nous appartient maintenant de montrer, à partir de ce principe historique, comment la notion de diaspora peut être modulée de manière originale et devenir un discours revendicatif à travers la chanson de protestation.

3. Les hypotyposes « diaspora » [dispersion]/« nation » [union]

Il va sans dire que parler de diaspora revient à considérer un point de départ qu’est la Nation définie statutairement par l’Etat dans la pensée occidentale. Le concept de « diaspora » est donc inhérent au concept idéal de la « nation ». Or, la nation telle qu’elle est pensée idéologiquement par le « Centre », en Europe, se veut une structure homogène, universelle, où tout le monde, où toutes les composantes se trouvant sur le territoire national, partagent les mêmes valeurs. Or, ce n’est pas le cas dans la réalité « diverselle » du monde, comme le montre Édouard Glissant dans ses divers essais, car le concept de Nation présuppose l’idée d’une norme définie, la représentativité, la construction du mythe et de ce fait, le rejet de ce qui ne fait pas partie de cette norme. Pour étayer ces affirmations, on peut ajouter que la construction de la nation passe par le déni de la différence ethnique celé derrière le mythe de la citoyenneté. L’Européen a emporté ces notions en Amérique, dans ses malles. Toute diaspora se trouve confrontée à une forme d’assimilationnisme national. Selon Milka Valentin-Humbert, « La conscience créole des descendants de colons espagnols apparaît très tôt en terre américaine »14. Cependant, l’idée que se forge le quidam de la nation, diverge en fonction du milieu ou du périmètre social dans lequel il se trouve. Toute nation est hétérogène par sa structuration spatiale, territoriale (topologique, pédologique) et clanique. Cette agrégation de clans endogènes, symboles de division sociale, est représentative des ethè diasporiques minoritaires ou majoritaires. On peut dès lors admettre, dans la continuité de notre raisonnement, qu’une nation est composée de diasporas, si par « diaspora », on entend l’idée d’une unité communautaire. Prenons le cas de l’Amérique latine : la diaspora peut ne pas être un mouvement migratoire et être en même temps une culture itinérante, elle peut impliquer ou non un déplacement vers un endroit précis, localisable ou pas. Elle peut être une migration dans un monde virtuel, elle peut être un microcosme à valeur macrocosmique, un rapport de l’intérieur à l’extérieur ou de l’intérieur vers l’extérieur. La diaspora peut être statique, transculturelle ou transcontinentale, elle peut opérer une réification.

Dans le système hérité des colonies, il y a interactions, il y a choc culturel, frontière, rejet, incompatibilité relationnelle, car le rapport hiérarchique dominant/dominé demeure, comme l’a imposé le système colonial du centre à la périphérie. Dans la réalité quotidienne, il n’y pas de dépassement dialectique, à tel point que l’Amérindien, culture première d’Amérique, est étranger chez lui, sur le territoire qu’il occupe depuis la nuit des temps. Cette configuration particulière façonne l’esprit de la marge, d’une diaspora considérée comme ignorante et de ce fait méprisée et exploitée dans le système imposé par le « Centre ». Il y a simplement un rapport de force entre la périphérie et un centre autotélique, doté d’une force centripète, capable d’anthropophagie culturelle ou identitaire.

« Un homme qui possède le langage, nous disait Frantz Fanon, possède par contrecoup le monde exprimé et impliqué par ce langage »15. Le capitalisme, symbole civilisateur fort, profite bien de l’ignorance des masses marginalisées ; et cette forme de marginalisation est holiste, subsumée dans un système global. Pour Édouard Glissant, « si la nation produit dans des formes opprimantes, son langage devient revendication, moteur agi d’une libération, exigence embusquée dans les taillis culturels »16. A l’aune de ces citations, nous comprenons que le langage de la Nation est divers, et peut se manifester dans l’art, la littérature, la chanson.

S’agissant de notre étude, nous nous intéresserons singulièrement à l’esthétique de Rubén Blades, remplissant la fonction de désacralisation, d’hérésie, d’analyse intellectuelle, mettant à nu les mécanismes cachés du système politique pour le démystifier, et la fonction de sacralisation développant une conscience collective en rassemblant un ethos diasporique autour de valeurs, de mythes ou d’idéologie. Mais avant de voir les influences des productions musicales de Rubén Blades sur la formation et transformation des identités culturelles transnationales, il demeure important de resituer « la salsa consciente » dans son contexte diasporique.

4. La salsa : expression artistique née dans le terreau fertile de l’entre-deux diasporique

La salsa est l’élaboration d’un mélange rythmique et non la création d’un nouveau rythme. Pour Isabelle Leymarie, c’est une condensation de rythmes tels que le Son, le Montuno, la Guaracha, le Bolero, le Merengue, la Bomba, la Plena, le Mapellé, la Cumbia, le Paséito, le Joropo17. L’origine du mot est sujette à controverse comme le signale Saúl Escalona. C’est un « élément qui calme les passions, qui donne force à la classe dominée de n’importe quelle société latino-américaine qui se reconnaît en elle, c’est un élément unificateur, un facteur d’homogénéisation, un moyen imaginaire de voyager d’un pays à l’autre »18. Elle naît dans le creuset new-yorkais des années 1960, prend son envol avec le groupe Fania All Star (en 1964), formé par Willie Colón, Johnny Pacheco, Jerry Masucci, Larry Harlow, Bobby Valentin, Ismaël Miranda, Celia Cruz, Héctor Lavoe, Ray Barreto, Ismaël Rivera, Marvín Santiago, Cheo Feliciano, Rubén Blades…, avec la diaspora latino-américaine, et prend une importance définitive en 1975 avec le film Salsa de la Fania All Sars19. Les artistes de salsa ont réussi à communiquer avec leur pays adoptif, à telle enseigne que la salsa a son audience aux USA, mais surtout en Amérique latine ; il s’opère aussi une osmose culturelle entre les États-Unis et l’Amérique latine, d’autant que dans le terreau fertile de la diaspora new-yorkaise, est identifié formellement le Latino-américain par rapport à d’autres diasporas ou aux Américains officiels. La Salsa est alors l’expression de l’âme de la Caraïbe hispanique et se réfère, selon les chansons, dans un premier temps, à la vie quotidienne des Latino-Américains dans la ville de New York.

5. De l’impact de la production bladésienne

Pour Saúl Escalona, « la musique de Blades est d’un éclat et d’une rare virtuosité, brillante, inventive, pleine d’une pyrotechnie orchestrale inusuelle »20.

Rubén Blades représente la voix (vox populi) des classes basses et moyennes d’Amérique latine. Selon lui, l’idée consiste à « créer un genre musical littéraire qui ne soit pas présomptueux, mais qui soit perceptible et clair, en créant des figures qui suggèrent des choses aux gens qui n’ont pas à la base reçu de formation littéraire »21. Pour l’ethnomusicologue Marisol Berríos-Miranda, « La salsa permettait la formation de nouvelles alliances. Elle bousculait les hiérarchies culturelles, non seulement en opposant la culture latino-américaine à la culture anglo-saxonne, mais aussi en incorporant le style africain, défiant ainsi une société raciste. La popularité de la salsa suivait de près les mouvements des droits civiques et du Black Power »22. Il était surtout besoin de s’identifier ou de s’affirmer par rapport à la musique dominante. Tout en se distrayant, les gens pouvaient écouter des messages. Cette façon d’écouter en s’amusant pénètre les âmes et les consciences de la population latino-américaine. Comme le souligne Saúl Escalona, « en Amérique latine, on vit avec les idoles. Elles font partie de notre univers culturel et leurs apports ont contribué à créer une musique populaire caribéenne »23. Elle est une véritable thérapie, on l’écoute au travail, au restaurant, dans les informations quotidiennes…24.

Notons que tout le xxe siècle, en Amérique latine, est marqué par l’aggravation des inégalités, des conditions de vie infrahumaines. Au gré des décennies, la vie se dégrade, la violence augmente (guérillas25, criminalité, trafics de drogue), conséquences d’un contexte politique international et national difficile (guerres mondiales, guerre froide, dictatures…), les écarts ou inégalités sociales se creusent. L’exemple le plus flagrant est celui du Mexique où l’on peut voir que 0,2% du total de la population en 1994, soit 183 000 personnes, détiennent des fortunes équivalant à 51% du total du PIB du pays, le plus fort taux d’inégalité dans le monde26.

La chanson de protestation de Blades en Amérique latine prend en compte tous ces paramètres sociaux, toutes les difficultés existentielles des défavorisés, et devient le vecteur idéal de la pensée diasporique, c’est-à-dire, des diasporas défavorisées ou laborieuses, pour reprendre le terme du sociologue Robin Cohen27 dans son étude sur les diasporas de ceux qui sont marginalisés et n’ont pas voix au chapitre dans le système tel qu’il est conçu.

Rubén Blades a déjà gravé plus d’une vingtaine d’albums et près de 200 chansons. Pour mettre en évidence l’impact social et l’impact culturel de son expression musicale nouvelle, nous proposons l’analyse d’un corpus global et restreint de ses chansons.

L’album Metiendo Mano de 1977, réalisé avec Willie Colón (Fania All Stars), où l’on retrouve les chansons « Plantación Adentro » et « Pablo Pueblo », a eu un impact indéniable sur les puristes de la salsa, sur un public majoritairement latino-américain, et a ouvert la possibilité d’une salsa posant des questions d’ordre social. Les morceaux de Blades parlent aux gens de ce qu’ils sont et de ce qu’ils vivent chaque jour. Ce qui ressort le plus chez lui, c’est un intérêt marqué par la culture racine Amérique, Amor América (Abia yala bin sogue), la terre mère, Papa Egoro28, la Pacha Mama

S’agissant de la forme des chansons, ce qui surprend à cette époque de gestation de la salsa, c’est la longueur de ses textes, lesquels ne semblent pas correspondre aux formats préétablis par les maisons de disques. Cela ne l’a pas empêché d’être reconnu par son public. Prenons le cas d’un morceau « Pedro Navaja » (1978) tiré de l’album Siembra qui décrit l’aventure malheureuse d’un fier-à-bras de New York, et qui fera de l’auteur, un mythe. La chanson, sur une tonalité satirique d’humour noir, souligne l’horreur du crime urbain, l’indifférence et sous-entend les difficultés liées à l’immigration et à la vie urbaine. « Pedro Navaja » est un récit brut dans lequel un témoin raconte une histoire, où seules les expressions viennent donner une opinion teintée de beaucoup de fatalisme. L’album connaît un vif succès et sera vendu à plus d’un million d’exemplaires (disque d’or et de platine). Par ailleurs, il nous faut prendre en compte le nombre de reproductions illégales d’albums en Amérique latine, étant donné que les structures juridiques de protection des œuvres telles que nous les connaissons en Europe, sont quasi inexistantes et en Amérique latine voire aux États-Unis. En tous les cas, Rubén Blades ne peut faire un concert en Amérique latine si ce morceau n’est pas pris en compte dans son répertoire, car le public, systématiquement, le lui réclame. « Pedro Navaja » fera prendre conscience réellement que la salsa peut véhiculer un message social. Notons que feu Gabriel García Márquez, son ami intellectuel, lui avoua sa jalousie de ne pas en être l’auteur.

Avec un nouveau groupe, Seis del Solar, il signe chez Elektra Record en 1984 et continue son expérimentation musicale, mais de manière plus approfondie que sur les autres albums, car l’on retrouve des morceaux tels que « Buscando América », « El Padre Antonio y su Monaguillo Andrés », « Desapariciones », « Decisiones », éléments discographiques qui feront de lui un porte-parole efficace, mettant en lumière les problèmes sociaux, la violence délibérée, les injustices dont souffre l’Amérique latine. Signalons également la conceptualisation musicale au service de ses messages. Citons à cet effet « Buscando América » qui est le morceau déterminant de son idearium bolivarien ; l’on retrouve particulièrement une musique créative au service d’un texte qui participe à un message vital identificatoire ayant un ancrage symbolique profond et questionnant l’identité continentale latino-américaine comme étant perdue dans la confusion et l’obscurité.

En tout et pour tout, Rubén Blades cumule 13 grammies avec ses albums Escenas (1985), Antecedente (1988), Rosa de los Vientos (1996), Tiempos (1999), Mundo (2002), Across 110th Street (2004), La Perla (2009, invitado al disco Los de atrás vienen conmigo de Calle 13), Cantares del subdesarrollo (2010), Todos Vuelven Vol. 1 & 2 (2011), Tangos (2014), Son de Panamá (2015) et Salsa Big Band (2017). Ces grammies sont obtenus dans quatre catégories distinctes : Latin/Pop, Salsa/Merengue, World Music et Tropical Latin Performance29. Rubén Blades est donc un des artistes latino-américains les plus primés ; auteur compositeur, d’origine panaméenne, de « Salsa Consciente » contemporaine, il incarne une pensée dans laquelle se retrouve représentée une diaspora transcontinentale, qui traverse le continent latino-américain tout entier dans sa dimension d’humanité exploitée, et qui diffère de la vision des diasporas classiques.

Il va de soi que les producteurs tels que Sony Music International connaissent très bien le marché latino-américain, lequel, si nous tenons compte du Brésil, représente un marché discographique potentiel de près de 600 millions consommateurs. L’image du Latino est mythifiée et est de plus en plus présente dans la conscience des populations dispersées et citoyennes latino-américaines. Dans l’écriture et l’esthétique de la marge ou de la diaspora bladésienne, il existe la conscience d’une différenciation latino-américaine, une construction mythologique qui prend en compte la dimension continentale rêvée jadis par Simón Bolívar, et qui est transversale à toutes les sociétés de ces pays.

Si dans les années 70-80 le terme diaspora est doté du simple sens de population vivant hors du centre originel, Rubén Blades, par sa pratique artistique, exprime une pensée diasporique transcontinentale latino-américaine de revendication qui tire son origine de la décennie précédente, une pensée solidaire qui unit un groupe humain, populaire, localisable en Amérique, autour de concepts d’humanisme, de vérité, de justice. Cette pensée structurée par les African studies (années 60-70), comme le souligne Denise Helly, conteste la modernité dans ses contradictions. Pour Blades, la diaspora n’est pas un état, un ensemble de traits empiriques, un type de communauté ethnique, mais une représentation de la dispersion. La représentation d’êtres en marge d’ensembles culturels stables, en constante hybridation et en mouvement.

Conclusion

La mémoire diasporique n’est pas seulement celle d’un malheur passé, mais aussi celle d’une expérience partagée de mise à l’écart et d’assignation à la marge, à la différence, voire à l’anormalité et l’inhumanité. En ces temps de louanges de la mobilité et de l’hybridation par des milieux universitaires et intellectuels, la marge est embellie de sa distance à un centre, un État, une norme majoritaire. Mais les majorités culturelles sont-elles stables en ces temps de crise où la marge véhicule plus que jamais un danger potentiel ? Si les populations pauvres et moyennes d’Amérique latine se reconnaissent dans la pratique idéologique et artistique de Blades, chanteur-interprète, auteur-compositeur de l’humanité exploitée, cela revient à dire que ces communautés de plus en plus populeuses sur le continent latino-américain (et dans le monde), sont solidaires et font bloc dans leur imaginaire. On peut admettre, en filigrane, au gré des évolutions du temps, qu’elles observent, analysent, assimilent, « conscientisent », et qu’elles parviendront peut-être à la difficile et ultime étape de mise en œuvre d’une nouvelle manière de concevoir la vie en communauté, en société ; une manière de se percevoir et de percervoir l’Autre basée sur le respect de la vie, de l’Homme et de son environnement.

1 Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales, Dictionnaire en ligne.

2 Ibidem.

3 Denise Helly, « Diaspora : un enjeu politique, un symbole, un concept ? », Espace populations sociétés, 2006/1, mis en ligne le 01 avril 2008 : URL 

4 Stéphane Dufoix, « Chronique bibliographique : l’objet diaspora en questions », Cultures & Conflits, 33-34, printemps-été 1999, [En ligne], mis en

5 Epoque de terreur avec Antonio Noriega comme bras droit d’Omar Torrijos, qui instaure une autocratie à Panama.

6 Michel Foucher, L’obsession des Frontières, Librairie Académique Perrin, 2007, p. 132

7 Denise Helly, Ob. Cit.

8 Professeur de Sociologie à l’Université de San Marcos au Pérou.

9 Luís Martinez-Andrade, « La reconfiguración de la colonialidad del poder y la construcción del Estado-nación en América Latina », Amérique latine

10 Institution coloniale qui consistait à attribuer un certain nombre d’indigènes à une personne comme main-d’œuvre au XVIe siècle, et plus tard

11 Marie-José Nadal, A l’ombre de Zapata, Vivre et mourir dans le Chiapas, Éditions du Felin, Paris, 1995.

12 Chantal Maignan-Claverie, Le Métissage dans la Littérature des Antilles françaises, Le Complexe d’Ariel, Éditions Karthala, Paris, 2005, p.41-63.

13 Carmen Medrano-Ollivier, « La Colombie, lieu d’“hybridité” et sa question identitaire », Actes du Colloque international tenu à l’Université des

14 Milka Valentin-Humbert, « Nation et ethnicité en Amérique hispanique », Actes du Colloque international tenu à l’Université des Antilles Guyane (10

15 Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs, Éditions du Seuil, Paris, 1952, p. 14.

16 Edouard Glissant, Le Discours Antillais, Editions Gallimard, Le langage de la Nation, p. 617.

17 Isabelle Leymarie, Musiques Caraïbes, Actes Sud, Cité de la Musique, 1996, p. 5-6.

18 Saúl Escalona, La Salsa, Pa’Bailar mi gente, un phénomène socio-culturel, Éditions L’Harmattan, Paris, 1998, p. 62.

19 Isabel Aretz, América Latina en su música, Unesco, 5ta Edición, México, p. 87.

20 Saúl escalona, op. Cit., p. 73.

21 Entretien personnel avec Rubén Blades à Panama en 1999, Casco Viejo de San Felipe, Panamá City. Cf. Mémoire de Maîtrise intitulé Rubén Blades : un

22 Marisol Berríos-Miranda, « La musique salsa en tant que libération expressive, au carrefour culturel des années 70 », Séminaire d’ethnomusicologie

23 Saúl Escalona, La Salsa, phénomène socio-culturel dans les Caraïbes Hispaniques, http://www.salsafrance.com/articles/salsa_phenomene_socioculturel.

24 Saúl Escalona, Ibidem.

25 En Colombie et au Salvador.

26 José del Pozo, Op. cit. p. 374.

27 Chercheur à l’Institut International de Migration, Professeur de sociologie à Oxford.

28 En langue Emberá, Papa Egoro veut dire Terre mère ; c’est aussi le nom du parti politique de Rubén Blades.

29 Daniel Domínguez,Los 13 Grammy de Rubén Blades, La Prensa, Cine y más, https://www.prensa.com/cine_y_mas/Grammy-Ruben-Blades_7_4351134844.html, 21

Travaux en ligne

Berrios-Miranda Marisol, « La musique salsa en tant que libération expressive, au carrefour culturel des années 70 », Séminaire d’ethnomusicologie caribéenne : http://svr1.cg971.fr/lameca/dossiers/ethnomusicologie/pages/berrios_miranda_fr_2003.htm

Dominguez Daniel, « Los 13 Grammy de Rubén Blades », La Prensa, Cine y más, 21 novembre 2015 : https://www.prensa.com/cine_y_mas/Grammy-Ruben-Blades_7_4351134844.html

Dufoix Stéphane, « Chronique bibliographique : l’objet diaspora en questions », Cultures & Conflits, 33-34, printemps-été 1999, mis en ligne le 16 mars 2006 : http://www.conflits.org/index495.html

Escalona Saúl, « La Salsa, phénomène socio-culturel dans les Caraïbes Hispaniques » : http://www.salsafrance.com/articles/salsa_phenomene_socioculturel.htm

Helly Denise, « Diaspora : un enjeu politique, un symbole, un concept ? », Espace populations sociétés, 2006/1, mis en ligne le 01 avril 2008 : http://eps.revues.org/index960.html

Martinez-Andrade Luís, « La reconfiguración de la colonialidad del poder y la construcción del Estado-nación en América Latina, Amérique Latine Histoire et Mémoire ». Les Cahiers ALHIM, 15 | 2008, Puesto en línea el 29 juin 2009 : http://alhim.revues.org/index2878.html

Travaux théoriques

Aretz Isabel, América Latina en su música, Unesco, 5ta Edición, México, 344 p.

Badie Bertrand, La Fin des Territoires, Essai sur le désordre international et sur l’utilité sociale du respect, Édition Fayard, Espace politique, Paris, 1995.

De Montbrial Thierry, Géographie Politique, Que sais-je ?, PUF, Paris 2006.

Desert Gérald, La question de la Frontière et de l’identité mexicaine à travers Gringo Viejo et la Frontera de Cristal de Carlos Fuentes, Mémoire de Master II soutenu en 2008 à la faculté des Sciences Humaines, UAG Martinique dirigé par Belrose Maurice.

Escalona Saúl, La Salsa, Pa’Bailar mi gente, un phénomène socio-culturel, Éditions L’Harmattan, Paris, 1998, 174 p.

Fanon Frantz, Peau noire, masques blancs, Éditions du Seuil, Paris, 1952, 190 p.

Foucher Michel, L’obsession des Frontières, Librairie Académique Perrin, 2007, 248 p.

Gachie-Pineda Maryse, La Frontière Mexique-Etats-Unis : Rejets, Osmoses et Mutations, Article de Annick Tréguer : La Frontière Mexique/États-Unis : Transgression et Militarisation, Textes recueillis par Maryse Gachie-Pineda et Serge Ricard, Centre d’Analyse et de Recherche Nord-Américaines et Latines, 1995.

Glissant Edouard, Le Discours Antillais, Editions Gallimard, Le langage de la Nation, p. 617

Grosfoguel Ramón, « Les implications des altérités épistémiques dans la redéfinition du capitalisme global, transmodernité, pensée frontalière et colonialité globale », Revue trimestrielle Multitudes, Editions Amsterdam, N° 26, Paris, 2006.

Leymarie Isabelle, Musiques Caraïbes, Actes Sud, Cité de la Musique, 1996, 176 p.

Maignan-Claverie Chantal, Le Métissage dans la Littérature des Antilles françaises. Le Complexe d’Ariel, Éditions Karthala, Paris, 2005, 281 p.

Medrano-Ollivier Carmen, « La Colombie, lieu d’“hybridité” et sa question identitaire », Actes du Colloque international tenu à l’Université des Antilles Guyane (10-11 mars 2005), Penser l’Entre-deux, Entre hispanité et américanité, Publications de l’APHM-CEREAH, Manuscrit Université, 466 p.

Melyon-Reinette Stéphanie, Haïtiens à New York City, Entre Amérique noire et Amérique multiculturelle, L’Harmattan, Paris, 2009, 345 p.

Valentin-Humbert Milka, « Nation et Ethnicité en Amérique Hispanique », Actes du Colloque international tenu à l’Université des Antilles Guyane (10-11 mars 2005), Penser l’Entre-deux, Entre hispanité et américanité, Publications de l’APHM-CEREAH, Manuscrit Université, p. 295-308.

Travaux historiques

Nadal Marie-José, a l’ombre de Zapata, Vivre et mourir dans le Chiapas, Éditions du Félin, Paris, 1995, 272 p.

Del Pozo José, Histoire de l’Amérique latine et des Caraïbes, de 1825 à nos jours, Éditions Nouveau Monde, Paris, 2006, 398 p.

Recherches sur Rubén Blades

Cerdeño Roberto, La Calle del Autor, Editions Panamá, Panamá, 1992.

Désert Gérald, Rubén Blades : Un Chanteur engagé avec l’Amérique Latine et L’Humanité Exploitée, Mémoire de Maîtrise soutenu en 1999 à la faculté de Sciences Humaines, UAG Martinique, dirigé par Belrose Maurice. (Étude d’un corpus de 25 chansons de l’auteur).

1 Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales, Dictionnaire en ligne.

2 Ibidem.

3 Denise Helly, « Diaspora : un enjeu politique, un symbole, un concept ? », Espace populations sociétés, 2006/1, mis en ligne le 01 avril 2008 : URL : http://eps.revues.org/index960.html

4 Stéphane Dufoix, « Chronique bibliographique : l’objet diaspora en questions », Cultures & Conflits, 33-34, printemps-été 1999, [En ligne], mis en ligne le 16 mars 2006. URL : http://www.conflits.org/index495.html

5 Epoque de terreur avec Antonio Noriega comme bras droit d’Omar Torrijos, qui instaure une autocratie à Panama.

6 Michel Foucher, L’obsession des Frontières, Librairie Académique Perrin, 2007, p. 132

7 Denise Helly, Ob. Cit.

8 Professeur de Sociologie à l’Université de San Marcos au Pérou.

9 Luís Martinez-Andrade, « La reconfiguración de la colonialidad del poder y la construcción del Estado-nación en América Latina », Amérique latine Histoire et Mémoire. Les Cahiers ALHIM, 15 | 2008, [En línea], Puesto en línea el 29 juin 2009. URL : http://alhim.revues.org/index2878.html

10 Institution coloniale qui consistait à attribuer un certain nombre d’indigènes à une personne comme main-d’œuvre au XVIe siècle, et plus tard, groupe de personnes devant payer une somme d’argent à l’Encomendero. José del Pozo, Histoire de l’Amérique latine et des Caraïbes, de 1825 à nos jours, Éditions Nouveau Monde, Paris, 2006, p. 433.

11 Marie-José Nadal, A l’ombre de Zapata, Vivre et mourir dans le Chiapas, Éditions du Felin, Paris, 1995.

12 Chantal Maignan-Claverie, Le Métissage dans la Littérature des Antilles françaises, Le Complexe d’Ariel, Éditions Karthala, Paris, 2005, p.41-63.

13 Carmen Medrano-Ollivier, « La Colombie, lieu d’“hybridité” et sa question identitaire », Actes du Colloque international tenu à l’Université des Antilles Guyane (10-11 mars 2005), Penser l’Entre-deux, Entre hispanité et américanité, Publications de l’APHM-CEREAH, Manuscrit Université, p. 273-282.

14 Milka Valentin-Humbert, « Nation et ethnicité en Amérique hispanique », Actes du Colloque international tenu à l’Université des Antilles Guyane (10-11 mars 2005), Penser l’Entre-deux, Entre hispanité et américanité, Publications de l’APHM-CEREAH, Manuscrit Université, p. 295-308.

15 Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs, Éditions du Seuil, Paris, 1952, p. 14.

16 Edouard Glissant, Le Discours Antillais, Editions Gallimard, Le langage de la Nation, p. 617.

17 Isabelle Leymarie, Musiques Caraïbes, Actes Sud, Cité de la Musique, 1996, p. 5-6.

18 Saúl Escalona, La Salsa, Pa’Bailar mi gente, un phénomène socio-culturel, Éditions L’Harmattan, Paris, 1998, p. 62.

19 Isabel Aretz, América Latina en su música, Unesco, 5ta Edición, México, p. 87.

20 Saúl escalona, op. Cit., p. 73.

21 Entretien personnel avec Rubén Blades à Panama en 1999, Casco Viejo de San Felipe, Panamá City. Cf. Mémoire de Maîtrise intitulé Rubén Blades : un chanteur engagé avec l’Amérique latine et l’humanité exploitée, sous la direction du Professeur Maurice Belrose, Université des Antilles Guyane, 1999.

22 Marisol Berríos-Miranda, « La musique salsa en tant que libération expressive, au carrefour culturel des années 70 », Séminaire d’ethnomusicologie caribéenne, http://svr1.cg971.fr/lameca/dossiers/ethnomusicologie/pages/berrios_miranda_fr_2003.htm

23 Saúl Escalona, La Salsa, phénomène socio-culturel dans les Caraïbes Hispaniques, http://www.salsafrance.com/articles/salsa_phenomene_socioculturel.htm

24 Saúl Escalona, Ibidem.

25 En Colombie et au Salvador.

26 José del Pozo, Op. cit. p. 374.

27 Chercheur à l’Institut International de Migration, Professeur de sociologie à Oxford.

28 En langue Emberá, Papa Egoro veut dire Terre mère ; c’est aussi le nom du parti politique de Rubén Blades.

29 Daniel Domínguez, Los 13 Grammy de Rubén Blades, La Prensa, Cine y más, https://www.prensa.com/cine_y_mas/Grammy-Ruben-Blades_7_4351134844.html, 21 novembre 2015.

Gérald Désert

Université des Antilles, gerald.desert@univ-antilles.fr

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